« L’écart de PIB est désormais de 80 % entre l’Europe et les Etats-Unis »

L’Europe décroche depuis le Covid-19.

           

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en complément de mon premier commentaire : FACE AU PROTECTIONNISME AMERICAIN (« INFLATION REDUCTION ACT ») L'UE EST DEMUNIE !

Le mardi 7 février, les ministres de l’Économie française et allemande, Bruno le Maire et Robert Habeck se sont rendus à Washington afin d’exprimer le désaccord de l’UE vis-à-vis de la politique protectionniste américaine.

L’IRA a été instauré aux USA pour favoriser l’industrie américaine grâce à des crédits d’impôt ou des subventions avec un pan dédié aux activités « vertes ». 369 milliards de dollars serviront par exemple à subventionner les industries solaires, éoliennes américaines ou financeront des crédits d’impôt (7000€) pour des véhicules électriques, dont ne bénéficieront pas les constructeurs étrangers.
L'UE dénonce, « Si elle est mise en œuvre dans sa forme actuelle, la loi pourrait déclencher une course mondiale aux subventions tirées vers le bas, sur les technologies et les intrants clés pour la transition verte ». En déplacement à Washington en novembre 2022, Emmanuel Macron avait tonné face au sénateur démocrate Joe Manchin : « vous faites du mal à mon pays ! ».

Avec l’IRA (Inflation reduction Act), les USA subventionnent massivement, faussant ainsi la libre concurrence avec l’industrie européenne. L'IRA c'est défendre et promouvoir les intérêts économiques des USA dans un contexte économique difficile et d’intensification de la compétition économique avec la Chine. Et à cette fin, ils sont prêts à accepter et même favoriser une accélération du déclin économique et industriel de l’Europe.

L’Inflation Reduction Act autorise 391 milliards de dollars de dépenses en faveur des secteurs de l’énergie et du développement durable. Le texte prévoit 270 milliards de dollars d’avantages fiscaux, en particulier pour la production de véhicules électriques. Au-delà de ces subventions massives, l’objectif est de privilégier les productions sur le sol américain en leur donnant un avantage considérable sur la concurrence importée.

De fait, le gouvernement américain ne se cache pas de sa volonté d’améliorer l’attractivité des USA pour les industries vertes, y compris au détriment des Européens qui sont pourtant de proches alliés. Le gouvernement américain organise d’ailleurs des campagnes d’information sur l’IRA et les avantages résultant d’une installation aux États-Unis.

L’IRA a été qualifié de menace existentielle pour des pans entiers de l’industrie européenne déjà confrontée à des prix de l’énergie bien plus importants qu’aux USA. Par ailleurs, la Chine elle aussi subventionne massivement son industrie dans le secteur du développement durable. C’est donc la place des États membres de l’UE dans la compétition mondiale dans les secteurs de l’énergie et du développement durable qui est en jeu.

D’autres responsables européens, à commencer par le Commissaire français Thierry Breton, ont protesté contre l’attitude de Washington. Depuis les élections de mi-mandat de novembre 2022, l’équation politique à Washington s’est compliquée pour Joe Biden. Les membres du Congrès américain restent largement sourds aux protestations européennes. Pour certains d’entre eux, l’Union européenne devrait au contraire être satisfaite du texte puisqu’il s’agit d’une des initiatives les plus ambitieuses en matière de lutte contre le changement climatique prises par un gouvernement américain.
L’Union européenne n’a obtenu de Washington que la constitution d’un groupe de travail bilatéral pour examiner ses difficultés avec le texte et les moyens d’y remédier. Impuissante à faire modifier le texte de loi, l’UE demande que les subventions du gouvernement américain soient à tout le moins distribuées en toute transparence, afin qu’elle puisse savoir à quoi s’en tenir et tenter de rééquilibrer la situation pour son industrie.

Ceci posé, l’administration Biden a également exprimé clairement que l’Union européenne était dans son droit de mettre en place des mesures similaires en faveur de sa propre industrie. Une invitation à agir qui n’en est pas réellement une puisqu’elle méconnaît les débats internes à l’Union européenne sur les sujets liés à l’intervention de l’État dans l’économie et aux subventions publiques.

Confrontée à une fin de non-recevoir américaine sur une revue en profondeur des mesures prévues par l’IRA, l’UE ne peut donc compter que sur elle-même. C’est le sens des propositions formulées par la Commission le 1er février. Mme von der Leyen a proposé un assouplissement des règles relatives aux aides d’État afin de donner plus de latitudes aux États membres pour subventionner leurs industries dans les secteurs du développement durable et des énergies renouvelables, pour un laps de temps limité. Elle prévoit aussi des mesures de simplification des démarches administratives et une stratégie pour assurer la sécurité des chaînes d’approvisionnement pour les matières premières dont l’UE a besoin, notamment pour le déploiement des énergies renouvelables.

Si elles vont dans le bon sens pour doter les États membres des moyens de se défendre face aux subventions américaines, ces mesures pâtissent d’une limite majeure : elles ne sont pas associées à de nouvelles dépenses budgétaires, laissant les États assurer individuellement le financement de ces aides. La Commission prévoit d’utiliser les fonds non consommés du plan de relance post-Covid et ceux mobilisés pour le soutien aux entreprises européennes confrontées aux conséquences des sanctions contre la Russie.

Un hypothétique « fond de souveraineté » financé par une nouvelle émission de dette commune et dédiée à financer certains secteurs de pointe doit être étudié par la Commission d’ici à l’été. Sans capacités nouvelles de financement, la réponse de l’UE ne sera pas à la hauteur des risques encourus par l’industrie européenne. Au final, ce sont les entreprises privées qui effectuent les décisions d’investissement, et ce que l’Union européenne a mis sur la table ne fait pas le poids face aux mesures prévues par l’IRA.

D’autant que les dynamiques politiques au sein de l’Union européenne pourraient diluer encore davantage les mesures envisagées par la Commission. Le clivage traditionnel entre les interventionnistes (France, Italie, Espagne) et les libéraux (Pays-Bas, Danemark, Suède notamment) bloque toute possibilité d’avancées majeures au niveau européen.

Quant à l’Allemagne, elle affiche une proximité avec la France comme en témoigne le déplacement conjoint de Bruno Le Maire et de son homologue allemand à Washington le 7 février. La France et l’Allemagne sont les deux principaux États à disposer des moyens pour financer par eux-mêmes des subventions publiques à leur industrie, notamment automobile. Mais les divisions internes à la coalition menée par Olaf Scholz risquent de compromettre là encore les ambitions au niveau européen.

L’IRA pose une question de fond pour l’UE, qui est celle de sa capacité à agir en tant que puissance sur une question fondamentale pour l’avenir de son industrie dans le domaine du développement durable où elle a déjà investi beaucoup de capital politique et économique. L’approche américaine est sans ambiguïtés : il s’agit de défendre et promouvoir les intérêts économiques des USA dans un contexte économique difficile et d’intensification de la compétition économique avec la Chine. Et à cette fin, ils sont prêts à accepter et même favoriser une accélération du déclin économique et industriel de l’Europe. ( François-Joseph Schichan-09/02/2023)


depuis le début de la guerre en Ukraine, on a pu vérifier, sous les applaudissements nourris de 90% des médias européens, que l'UE était devenue le fidèle vassal de l'Oncle Sam et de ses intérêts géopolitiques. Pendant que les américains se gavaient des juteux fruits économiques (armements, gaz de schiste, pétrole...) de leur guerre par procuration, les européens dépensaient des sommes folles pour acheter de l'énergie et soutenir leurs entreprises. Pris en sandwich entre sa dépendance à l'égard de la Chine et son atlantisme servile à l'égard des USA, l'UE est devenue la cocue de la guerre en Ukraine. Jouer maintenant les étonnés concernant l'écart de PIB entre l'UE et les USA, c'est se moquer du monde. Cet écart avait peut être commencé avec le Covid mais il est devenu exponentiel depuis le début de la guerre en Ukraine


en complément de mon agacé précédent message : Renforcement du partenariat OTAN-UE : Bruxelles toujours plus alignée sur Washington
Privée de son surmoi gaullien, la France est soumise au fédéralisme clandestin de l’UE devenue otanienne

C'était à une époque où la politique étrangère de la France restait encore influencée par un surmoi gaullien qui faisait de la souveraineté un impératif catégorique non négociable. En novembre 1991, à Rome ,se tenait un sommet de l’OTAN alors que l’URSS se disloquait sous les yeux incrédules des Occidentaux. La question qui se posait alors était celle de l’avenir d’une organisation de défense collective qui trouvait son origine et sa finalité dans la volonté de faire face à une menace soviétique qui disparaissait.

Le rideau de fer était tombé et la fin de la guerre froide semblait ouvrir soudainement la possibilité d’une refondation des relations Est-Ouest transformant l’Europe en un vaste espace de coopération et de sécurité de Lisbonne à Vladivostok.

Mikhaïl Gorbatchev avait proposé de bâtir une « maison commune » paneuropéenne et François Mitterrand, à sa suite, en décembre 1989, avait lancé l’idée d’une « confédération européenne ». Les Américains ne voulaient cependant pas d’une refondation de l’Europe sur des bases susceptibles de menacer leur leadership, voire de les exclure. Redonner un sens nouveau à l’OTAN et neutraliser le projet d’une défense européenne autonome constituaient donc pour eux des enjeux majeurs. Il fallait réformer les structures euro-atlantistes afin d’assurer leur pérennité.

Au sommet de Rome, un « nouveau concept stratégique » de l’OTAN avait alors été proposé qui ne reposerait plus sur une logique de confrontation mais sur une « conception élargie de la sécurité » incluant des risques liés à de « graves difficultés économiques, sociales et politiques » (concept stratégique de l'OTAN, 7 novembre 1991).

Roland Dumas, ministre des Affaires étrangères, présent à l’époque à Rome, avait rapporté dans un livre entretien paru en 2013 (Diplomatie sur le vif, Presses de Sciences Po), les craintes de François Mitterrand de voir les Américains transformer l’OTAN en une « Sainte-Alliance » qui, sur le modèle de celle qui s’était formée en 1815, se donnerait pour mission de régenter tous les problèmes de l’Europe et même au-delà.

George Bush avait en effet déclaré : « L’Alliance a été utile, il ne faut pas la détruire, il faut la consolider et je serai amené, dans l’avenir, à vous faire des propositions sur l’utilisation que l’on peut faire de l’OTAN dans tous les conflits du monde. » À quoi Mitterrand avait répondu : « Dans le fond, ce que vous proposez, c’est une résurrection de l’Alliance de Vienne, la Sainte-Alliance. Pas question que la France entre dans ce système. »

Trente et un an plus tard, la France s’est débarrassée depuis longtemps de son surmoi gaullien et s'est désormais parfaitement intégrée au « système » otanien. Et pour ce qui est de la « souveraineté européenne » chantée par Emmanuel Macron, elle demeure plus que jamais indissociable d’une Alliance atlantique dont les États-Unis n’ont pas l’intention de lâcher le gouvernail.

Le 10 janvier 2023 , le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, le président du Conseil européen, Charles Michel, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, se sont retrouvés au siège de l'OTAN pour signer une déclaration conjointe visant à renforcer et à élargir davantage le partenariat stratégique entre l'OTAN et l'Union européenne. Parmi les objectifs affichés, « préserver la paix, la liberté et la prospérité dans la zone euro-atlantique » mais aussi « accroître la sécurité en Europe et au-delà ». L’Alliance atlantique prétend bien devenir, comme Mitterrand le craignait, un « directoire du monde » échappant toujours plus à sa vocation originelle.

Le conflit ukrainien aura, de ce point de vue, constitué pour Bruxelles comme pour Washington une formidable occasion d'accélérer, vis-à-vis des États-nations européens, une double captation de souveraineté.

La première, incarnée par l’activisme d’Ursula von der Leyen, se traduit, dans le prolongement de la crise du Covid, par une volonté d’extension des prérogatives de la Commission européenne : coordination de l’achat de vaccins, financement d’un plan de relance de plus de 700 milliards d’euros et, surtout, soutien à l’Ukraine à grand renfort de déclarations tonitruantes, de paquets de sanctions et de livraison d’armes. Dans Marianne, en novembre 2022, l’eurodéputé François-Xavier Bellamy évoquait un « fédéralisme clandestin ».

La deuxième captation de souveraineté procède de l’arrimage de l’Union européenne à l’OTAN. Pour bien en comprendre les enjeux, il faut mesurer à quel point l’Alliance atlantique s’est transformée depuis 1949. Non seulement elle s’est élargie à l’Est, mais elle est surtout sortie de son ancrage régional euro-atlantique pour intervenir en différents points du monde au nom de la « sécurité internationale », comme le président Bush l’avait évoqué en 1991 au moment de la chute de l’URSS.

En réalité, l’OTAN s’aligne sur l’agenda stratégique américain qui a fait de la Chine sa priorité. Après la confrontation bipolaire de la guerre froide et le moment unipolaire qui lui a succédé, les États-Unis considèrent être désormais entrés dans une nouvelle ère que les documents de l’OTAN décrivent comme « le retour de la compétition géostratégique, un phénomène lié au comportement agressif de la Russie et à la montée en puissance de la Chine ».

Si, du côté de l’OTAN, on ne cesse de proclamer que la guerre en Ukraine a permis de renforcer l’alliance euro-atlantique, on oublie de dire que, dans le même temps, elle a aussi contribué à renforcer un couple sino-russe qui pourrait bien fédérer derrière lui une alliance anti-hégémonique menaçant l’imperium américain.
Dans un contexte de guerre hybride, il devient alors nécessaire d’associer aux moyens militaires des outils politiques, technologiques et économiques, comme les politiques de sanctions. D’où l’importance, pour les Américains, d’interfacer au maximum l’OTAN avec l’Union européenne. (Frédéric Lassez-15/01/2023)




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